Premiers éléments de perception
Plongée dans les entrailles d'un monstre urbain
Parmi mes nombreux voyages d'exploration urbaine, Lima fait figure de nouveauté. Rarement on a ressenti dans d'autres villes ce qu'on a pu ressentir à Lima. L’image qui vient à l’esprit, est celle d’un monstre urbain à l'apparence d'une pieuvre géante. Tel un être protéiforme, la ville donne à voir une gigantesque masse urbaine dont le caractère tentaculaire peut impressionner, ébahir, mais aussi susciter crainte, malaise et rejet. Lima ne se résume certainement pas à cette facette peu enviable, mais son image globale est indissociable de cette réalité prégnante, vécue au quotidien par le citadin et provisoirement par le visiteur. L’écrivain péruvien Sébastian Salazar Bondy avait d’ailleurs écrit en 1964, un livre dont le titre provocateur marque encore l’inconscient collectif, « Lima la Horrible ».Ce dernier décriait la réalité d'une ville en plein développement, marquée par la misère et dominée par une oligarchie mondaine, héritée du colonialisme espagnol, méprisante de la diversité et de l'identité péruvienne.
Lima procure un double sentiment d’écrasement et de perte de repère au cœur d’une espèce de jungle urbaine.La précarité de son système de transport public, la congestion de son trafic automobile couplée à une forte pollution de l’aire nuisent à la qualité de son environnement. Ils décrédibilisent l'image plus "écolo" que la ville souhaiterait promouvoir, en ayant accueilli notamment la Conférence de l'ONU sur le Climat en 2014. Enfin, le sentiment d’insécurité, les contrastes socio-spatiaux, l’anarchie urbanistique et architecturale entretiennent cette atmosphère pesante.
Le paradoxe liménien de la qualité de vie
Un récent classement réalisé par Lima Como Vamos, l'Observatoire métropolitain de la qualité de vie urbaine, a mis en évidence la très mauvaise position de Lima en comparaison à d’autres métropoles d’Amérique Latine en termes d’indice de satisfaction de la population. Les habitants seraient très insatisfaits de la qualité des services publics qui leurs sont offerts, méfiant de leur voisinage, et inquiets de l'insécurité rampante. Pourtant, une autre étude Ipsos a démontré que l’attachement et la fierté des liméniens pour leur ville restaient forts, et que les conditions de vie étaient perçues comme satisfaisantes (65% resteraient à Lima s'ils avaient à choisir).
Paradoxe, comme l’explique un journaliste du principal quotidien pérouvien El Commercio, qui tiendrait à la perception positive qu’ont les liméniens, de l’évolution de leur niveau de vie. La satisfaction de la population sur des variables économiques prendrait le dessus sur l’existence d’un cadre de vie pourtant préocuppant pour une part significative de la population.